Sur le « sectarisme »
En politique comme en philosophie, l’issue de bien des débats est prédéterminée par le choix des termes dans lesquels on les formule. Personne ne s’avisera de défendre le « sectarisme » en politique, parce que le mot lui-même enveloppe un jugement dépréciatif. Mais le « sectarisme » que les femmes et hommes de droite imputent à la gauche, ce peut être en réalité ce sens du collectif que cultivent en effet les femmes et hommes de gauche, dans un contraste si flagrant avec le culte, à droite, de la décision individuelle (appelée alors « indépendance d’esprit »).
« Je préfère mon pays à mon parti », dit-on parfois en français (car l’assonance serait plus difficile en espagnol, en italien ou en allemand) : souvent une noble manière de préparer les esprits à sa défection prochaine.
Dans les époques tourmentées, celles où se fait sentir une aspiration au « renouvellement des élites politiques », les gouvernements recourent volontiers à des technicien.ne.s ou à des « membres de la société civile » : on vante leur « connaissance des dossiers », et on flétrit ces « hommes et femmes d’appareil » qui ne devraient leurs places qu’à leurs clientèles propres. Derrière la qualification malveillante d’ « homme » ou de « femme d’appareil » se retrouve certes, parfois, l’intrigant.e incompétent.e ; mais aussi, souvent, le militant ou la militante, engagé.e de longue date, empreint.e de convictions à mettre en œuvre, et d’une réelle intégrité à refuser les transactions que ne manquent pas de préconiser les successeur.e.s éventuels, ou les prédécesseur.e.s.